Bouler
verbe
Sommaire
Définitions de « bouler »
Trésor de la Langue Française informatisé
BOULER, verbe.
I.− [L'image de base est celle de la formation précipitée d'une boule]
A.− Emploi intrans. [En parlant d'un animal, en partic. d'un lapin de garenne, et p. ext. d'une pers.] Tomber en se ramassant sur soi-même comme une boule :
1. Souvent, à l'extrême bout de la zone éclairée, deux longues oreilles [de lapin] passaient, coiffant une petite forme pâle, à peine distincte... Berlaisier, Sarcelotte l'apercevaient bouler sur place, au coup de fusil, et repéraient le cadavre immobile en attendant l'instant de le ramasser au passage. Genevoix, Raboliot,1925, p. 256.
2. ... on peut aussi se laisser bouler pour ne pas se faire mal quand on tombe de trop haut; ... Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 180.
− P. ext., rare. [En parlant d'une chose] :
3. ... la montagne pour toi c'est ton expérience des ronces, des pierres qui boulent et du vent sur les crêtes, ... Saint-Exupéry, Citadelle,1944, p. 672.
B.− Emploi trans.
1. Bouler un lapin, un lièvre. Le faire se ramasser comme une boule sur lui-même quand il reçoit le coup de fusil mortel :
4. Oh! les quelques lièvres de la Borderie, il en rêvait, il risquait la prison, pour en bouler un de temps à autre, d'un coup de feu. Zola, La Terre,1887, p. 325.
2. P. ext. [L'obj. désigne une pers., une chose] Faire rouler à terre d'un mouvement précipité, culbuter, renverser :
5. [L'apprenti à Colas :] − ... Tout ce que nous avons pu pour arrêter le feu, maître, nous l'avons fait... Allez donc arrêter un troupeau de gouris! Nous avons été balayés, roulés, foulés, boulés. R. Rolland, Colas Breugnon,1919, p. 203.
6. ... l'amour, ce bon gros amour, passe outre et boule l'obstacle. Colette, Mes apprentissages,1936, p. 170.
− P. métaph.
a) Arg. de théâtre. [En parlant d'un acteur] Bouler son texte, ses répliques. Précipiter son débit verbal (comme si les mots culbutaient l'un sur l'autre).
b) [Sans faire réf. au théâtre] Je boulais ma prière (Sartre, Les Mots,1964, p. 94):
7. Mais moi, dit-elle (soudain volubile, boulant les mots au point d'en bégayer un peu, comme si tout à coup elle avait dévalé une pente), moi, quoi que vous ayez cru, je ne me suis jamais jetée à votre tête. Montherlant, Pitié pour les femmes,1936, p. 1141.
3. [P. anal. de forme] (Cf. boulé adj. B 2).
− MODE. [Dans un chapeau] Donner une forme arrondie à la calotte ou à la passe.
− ZOOL. Le pigeon boule. Il enfle son jabot.
Rem. Attesté dans la plupart des dict. généraux.
C.− Emploi pronom.
1. [Avec une idée de précipitation] Au fig., très fam. Envoyer bouler qqn. L'éconduire ou le renvoyer sans ménagement.
Rem. Le pronom réfl. est normalement omis dans la constr. infinitive.
2. [Sans idée de précipitation]
a) [En parlant d'une pers.] Se pelotonner :
8. ... le soir, elle [MmeDésableau] se boulait sur sa chaise... Huysmans, En ménage,1881, p. 67.
b) [En parlant d'une chose] Prendre une forme arrondie :
9. Tout l'horizon se hérissait d'arbres tors et coudés, des branches fourchues, hersant les bords du ciel, d'un vaste ciel pâle où se boulaient, en des cernes ardoisés, de grands nuages pénétrés de lumière diffuse, vitrifiée, blanche comme l'amiante. Châteaubriant, M. des Lourdines,1911, p. 201.
II.− Emplois spéc. [La représentation de base est celle d'une boule, obj. fabriqué, intervenant dans un processus]
,,Un acteur qui a hâte d'arriver au bout de son rôle, et qui se soucie peu de produire des effets pour avoir plus vite fini est un « bouleur ». L'expression a été empruntée au mouvement d'une boule lancée qui roule jusqu'à la fin de sa course, en évitant ou en contournant, tout ce qui pourrait lui causer un arrêt`` (H. Génin, Le Lang. des planches,1911, p. 19).− SP. Bouler les cornes d'un taureau. Les rendre moins dangereuses par des boules fichées à leur extrémité (Lar. 20e, Rob., Quillet 1965).
− TECHNOL. [En parlant de fleurs artificielles] Donner à l'aide d'une boule, une forme aux pétales (Lar. 19e, Lar. 20e, Quillet 1965).
Prononc. − 1. Forme phon. : [bule]. 2. Homon. : boulai(s), boulai(en)t et boulaie, boulet.
Étymol. ET HIST. − 1. a) 1390 trans. « faire rouler » (Evrart de Conty, Probl. d'Arist., B.N. 210, fo212edans Gdf.); b) av. 1555 intrans. « rouler comme une boule » (Tahureau, Sonnetz, Odes et Mignardises, S. 83 dans Hug.); 2. 1704 « (en parlant d'un pigeon) se renfler » (Trév.). Dér. de boule*; dés. -er.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 15.
DÉR.
Bouleur, euse, subst.Arg. de théâtre. Acteur ou actrice qui boule son texte (cf. bouler B 2 a). ,,Un acteur qui a hâte d'arriver au bout de son rôle, et qui se soucie peu de produire des effets pour avoir plus vite fini est un « bouleur ». L'expression a été empruntée au mouvement d'une boule lancée qui roule jusqu'à la fin de sa course, en évitant ou en contournant, tout ce qui pourrait lui causer un arrêt`` (H. Génin, Le Lang. des planches,1911, p. 19).− 1reattest. av. 1867 (F. Sarcey dans Lar. 19e); dér. de bouler, suff. -eur2*.
BBG. − Sain. Arg. 1972 [1907], p. 168. − Sain. Sources t. 2 1972 [1925], p. 120, 152, 184. − Schuchardt (H.). Romanische Etymologien. 2. Sitzungsberichte der Philosophisch-historischen Klasse der kaiserlichen Akademie der Wissenschaften. 1899, t. 141, no3, p. 128.
Wiktionnaire
Français
Source : Wikitionnaire
Verbe
bouler \bu.le\ intransitif ou transitif 1er groupe (voir la conjugaison)
- Enfler, en parlant du pain, former une boule. Se mettre en boule, se pelotonner.
- […] le soir, elle [Mme Désableau] se boulait sur sa chaise. — (Joris-Karl Huysmans, En ménage, 1881, page 67)
- Prendre une forme arrondie.
- Tout l’horizon se hérissait d’arbres tors et coudés, des branches fourchues, hersant les bords du ciel, d’un vaste ciel pâle où se boulaient, en des cernes ardoisés, de grands nuages pénétrés de lumière diffuse, vitrifiée, blanche comme l’amiante. — (Alphonse de Châteaubriant, Monsieur des Lourdines, 1911, page 201)
- Enfler de la racine, en parlant du grain semé [1].
- Enfler sa gorge, en parlant du pigeon [1].
- Avoir du mal à prononcer, par précipitation, au théâtre, faire une boulette.
- Naturellement tu as encore beaucoup de progrès à faire, ta voix est insuffisamment travaillée et tu « boules » certains mots, mais ta tenue de scène est excellente et je suis certain… — (Jean-Pierre Ferrière, Maquillage, éditions Ditis, 1957)
- Chaque soir, j’attendais impatiemment la fin de la bouffonnerie quotidienne, je courais à mon lit, je boulais ma prière, je me glissais entre mes draps. — (Jean-Paul Sartre, Les mots, 1964, collection Folio, page 99)
- Avez-vous remarqué comme il parle mal ? Il boule ses phrases. Si je lui faisais prendre des leçons de diction avec cette personne, ça arrangerait tout, n’est-ce pas, monsieur Garcia ? C’est tellement beau de pouvoir réciter les jolis vers qu’on aime. — (Antoine Blondin, Monsieur Jadis ou l'École du soir, 1970, réédition Folio, 1972, page 51)
- Chuter en se ramassant sur soi-même, en parlant d’un animal, lièvre ou lapin, et par extension d’une personne.
- Juste après le coup de fusil, on le vit bouler.
- La balle atteignit la tête, ainsi que je l’avais calculé, et j’eus l’impression que les pattes de derrière du chevreuil montaient en l’air. Il retomba lourdement sur ses bois, et, boulant comme un vulgaire lapin, fit gicler la neige à droite et à gauche de sa mouvante tache brune. — (Maurice Constantin-Weyer, Un homme se penche sur son passé, 1928, réédition Nelson, page 219)
- À une pause, ivre de sommeil, je distingue mal la berme pour m’asseoir et je boule jusqu’au bas de la digue. — (Julien Gracq, Manuscrits de guerre, vers 1941-1942, page 61)
Sous le tir des policiers des fenêtres, deux étaient tombés au milieu de la rue, les genoux à la poitrine, comme des lapins boulés; […].
— (André Malraux, La condition humaine, 1946, réédition Folio Plus Classiques, 2019, page 98)- C’était tantôt celui-là qui marchait dans le sentier et il boulait comme un lièvre, tantôt celle-là en train de souffler son feu et elle tombait, le visage dans la braise. — (Jean Giono, Le hussard sur le toit, 1951, réédition Folio Plus, page 276)
L’un des molosses, pour esquiver un sabot de Jehol, boula, se releva, et Zéré eut devant elle sa tête épouvantable, dépouillée d’oreilles, aux babines retroussées sur un flot de bave et les yeux inondés de sang.
— (Joseph Kessel, Les Cavaliers, Gallimard, 1967)
- Tuer un animal, qui se ramasse alors sur lui-même comme une boule.
- Oh ! les quelques lièvres de la Borderie, il en rêvait, il risquait la prison, pour en bouler un de temps à autre, d’un coup de feu. — (Émile Zola, La Terre, quatrième partie, chapitre III)
- On voyait d’autres empreintes ; d’un côté celles qui montraient par où les loups, en quelques bonds allongés, avaient sauté sur les chiens ; et de l’autre celles qui disaient par où ils les avaient emportés après les avoir boulés ; de traces des chiens il n’en existait plus, à l’exception d’une traînée de rouge qui çà et là ensanglantait la neige. — (Hector Malot, Sans famille, 1878)
- (Par extension) S’applique aux êtres humains.
- Le vent était si fort, que j’ai été boulé !
- (Par extension) S’applique à un objet.
- Je guette chaque passage, chaque frisson sur la pierre, chaque papier qui boule, poussé par la respiration des corridors. — (Jean-Marie Le Clézio, Fantômes dans la rue, nouvelle, 2000, page 42)
- (Lorraine) Détruire, écrouler, particulièrement s’agissant d’une construction ou d’un bâtiment
- Le terrassier est venu ; c'était le seul moyen de bouler ce mur proprement.
- Elle faisait de grands efforts pour remonter le fleuve, avec ses vagues qui venaient du bout de l’horizon et qui déferlaient, et l’eau salée repoussait le fleuve en arrière, et la vague plate s’élançait entre les deux lèvres de l’estuaire, en boulant les galets, de toutes ses forces, de toute sa puissance de mer, mais elle se fatiguait, l’eau douce du fleuve poussait en sens inverse, et la vague plate s’étalait encore, elle essayait de gagner quelques mètres dans le chenal, quelques pouces, elle n’arrivait pas, elle s’épuisait, l’eau douce du fleuve la recouvrait et la vague retombait en arrière en cataracte pleine de mousse, elle redescendait à toute vitesse la pente de l’estuaire, entraînant les galets en sens inverse, vers la mer qui l’aspirait, qui la buvait. — (J. M. G. Le Clézio, Les Géants, Gallimard, 1973)
- (transitif) (Argot) Tabasser, passer à tabac quelqu'un.
- Je me suis fait bouler
- (Québec) (Populaire) Effectuer un travail de terrassement avec un bulldozer.
- Avant les lois sur l'environnement, on pouvait faire bouler tout le terrain jusqu'au lac, pour l'égaliser et le niveler en pente douce.
Littré (1872-1877)
bouler [1]
(bou-lé)
- 1 V. n. Enfler son jabot, en parlant du pigeon.
Se renfler, en parlant du pain.
- 2 V. a. Dans le langage populaire, bouler quelqu'un, le rouler par terre.
HISTORIQUE
XVIe s. Les glacez pelottons volans Que l'orage par les monts boule, Ne te soient durs ny violans
, Ronsard, 547. Ce gros monceau qui rompt, fracasse et foule Les bois tronquez, et d'un bruit violant Sans résistance à val se va boulant
, Ronsard, 653.
Étymologie de « bouler »
- (Date à préciser) Dénominal de boule et -er.
Boule.
Source : Dictionnaire LittréPhonétique du mot « bouler »
| Phonétique | Prononciation | |
|---|---|---|
| France (Vosges) : écouter « bouler » |
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| France (Lyon) : écouter « bouler » |
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Fréquence d'apparition du mot « bouler »
Source : GoogleTraductions du mot « bouler »
| Langue | Traduction |
|---|---|
| English | bouler |
| German | bouler |
| Spanish | bouler |
| Portuguese | bouler |
| Italian | bouler |
| Dutch | bouler |
| Polish | bouler |
| Russian | bouler |
Synonymes de « bouler »
Citations sur le mot "bouler"
Les hommes bouleversent tout avec leurs pieds.
Voltaire
La vie est un long boulevard où les fous sont unanimes. Les sages sont en défense devant tant de bouleversements.
Albert Brie
Il ne faut pas être bouleversé quand quelque chose bouleverse vos plans. Il faut seulement faire la partie du jeu qui arrive.
Alain

