Convoiter

verbe trans

Définitions de « convoiter »

Trésor de la Langue Française informatisé

CONVOITER, verbe trans.
A.− [Le compl. désigne une chose] Désirer avec avidité la possession et la jouissance d'une chose, qui appartient le plus souvent à un autre et dont on ressent intensément le manque.
1. [Chose matérielle] Les mères ambitieuses qui convoitaient pour leurs filles cette brillante position (Balzac, Curé vill.,1839, p. 21).L'Angleterre qui ne cessait de développer son commerce, convoitait âprement les colonies espagnoles (Bainville, Hist. Fr.,t. 1, 1924, p. 281).J'étais radicalement dénuée de ce genre d'ambition. Je ne convoitais ni l'argent, ni les honneurs, ni la notoriété (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 323):
1. J'évoquais l'enfant princier dont la languissante anorexie refuse les mets délicats et qui convoite la tranche de gros pain. Colette, Belles saisons,Discours de réception, 1936, p. 221.
Convoiter des yeux qqc. Bonheur d'avoir pu mordre à même le fruit sans le convoiter des yeux et sans demander de permission (Proust, Temps retr.,1922, p. 835).
Rem. Dans le discours relig., l'emploi de convoiter est souvent lié à l'idée de concupiscence. Le prêtre (...) commença les onctions : d'abord sur les yeux, qui avaient tant convoité toutes les somptuosités terrestres (Flaubert, MmeBovary, t. 2, 1857, p. 180).
Emploi partic. [Le suj. désigne un animal] Rechercher pour tuer et dévorer. Convoiter sa proie. Gare au renard qui convoiterait mes poules! (Dumas Père, Forest.,1865, III, 7, p. 206).
2. [Chose abstr.] Même si l'immortalité qu'il convoite est celle de Caïn, il la convoite au moins (Camus, Homme rév.,1951, p. 66):
2. Captif dans Paris tout l'après-midi, Pierre avait convoité l'air libre, dévoré du désir de monter vers les bois de Robinson, gourmand de la fraîcheur du soir. Morand, L'Homme pressé,1941, p. 21.
Rem. 1. La docum. atteste la constr. convoiter qqc. de qqn. Obtenir ce qu'il a voulu convoiter de nous (Maurras, Kiel, 1914, p. XIII). 2. Le compl. peut désigner une pers., le suj. une chose personnifiée. Les êtres trop riches que la maladie et la mort convoitent (Arnoux, Crimes innoc., 1952, p. 93).
Rare. [Suivi d'un inf. compl. prép. en de] Désirer fortement. La casaque de drap noir de feu son mari qu'elle convoitait sans doute d'utiliser encore quand elle aurait froid (Brasillach, Corneille,1938, p. 198).
B.− [Le compl. désigne une pers., souvent avec une nuance d'interdit] Éprouver un désir sexuel extrêmement fort pour quelqu'un et vouloir le posséder. Synon. (partiel) désirer.Ce jour-là, son mari l'avait convoitée comme si elle n'eût pas été sa femme (Radiguet, Bal,1923, p. 94).Dès qu'il me parut possible, je me repris à le convoiter. Jacques était beau, d'une beauté enfantine (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 207):
3. Il brûlait d'envie de la saisir au passage, de l'enlacer. Elle restait silencieuse et il était avide d'entendre d'elle ces mots vivants. Parfois il la chérissait seulement avec son cœur; parfois il la convoitait comme une proie. Pesquidoux, Le Livre de raison,1925, p. 24.
Emploi pronom. (réciproque). Mais à présent la première fraîcheur amène une détente, sinon un espoir. Tous descendent alors dans les rues, s'étourdissent à parler, se querellent ou se convoitent (Camus, Peste,1947, p. 1316).
C.− Emploi abs. [Correspond à A et B] Un veau tétait sa mère, avec la brutalité de l'homme qui convoite, lui donnant de vigoureux coups de tête (Montherlant, Bestiaires,1926, p. 489).
Rem. Lar. Lang. fr. atteste l'adj. convoitant, ante. Qui révèle de la convoitise. Des attitudes convoitantes et voraces (Daudet).
Avec son beau front (...), ses traits droits et ses formes arrondies, MmeLambert est un édifice en décadence, mais encore convoitable (Morand, La Clef du souterrain,1956, p. 62).
Prononc. et Orth. : [kɔ ̃vwate], (je) convoite [kɔ ̃vwat]. Ds Ac. 1694-1878. Étymol. et Hist. Av. 1155 coveitier (Wace, St Nicholas, 824 ds Keller); ca 1280 [ms. du xives.] convoitier (Clef d'amour, 1721 ds Gdf. Compl.); 1289 convetier (Doc. A. Loiret, ibid.), qualifié de ,,vieux mot`` par Rich. 1680. Du lat. pop. *cupidietare, dér. de *cupidietas, altération de cupiditas, sous l'infl. de termes abstraits tels que anxietas, medietas; la 1resyllabe a été refaite en con- sous l'infl. du préfixe. Fréq. abs. littér. : 242. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 294, b) 261; xxes. : a) 409, b) 391.
DÉR.
Convoitable, adj.,rare. Que l'on peut convoiter, qui est désirable. Avec son beau front (...), ses traits droits et ses formes arrondies, MmeLambert est un édifice en décadence, mais encore convoitable (Morand, La Clef du souterrain,1956, p. 62). [kɔ ̃vwatabl̥]. 1reattest. fin xiie-début xiiies. conveitable (Elie de S. Gile, éd. G. Raynaud, 1717); réputé ,,vieux mot`` par Rich. 1680; de conveitier, convoiter, suff. -able*. Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. − Wehrli (A.). Semantische Untersuchung der Verben..., 138 p. (Diss. Zürich, 1967).
Source : CNRTL

Wiktionnaire

Français

Verbe

convoiter \kɔ̃.vwa.te\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Désirer avidement ce qu’un autre possède.
    • Le 19 octobre 1852, le prince Louis-Napoléon, encore président de la République, mais convoitant ardemment l’hérédité impériale, avait dit dans un discours […]. — (Émile de Girardin, en préface de Le dossier de la Guerre de 1870 - 23 septembre 1877)
    • Peut-être donnerait-elle au Maître un garçon. Eh bien! tant mieux! la fortune, du moins, n’irait pas aux neveux et aux cousins du Cheikh qui la convoitaient déjà. — (Out-el-Kouloub, Zaheira, dans "Trois contes de l’Amour et de la Mort", 1940)
    • Faites une France très forte, et nul n’osera jamais convoiter ses colonies. Laissez la France se débiliter davantage et son empire colonial, d’une manière ou d’une autre, s’écroulera. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
    • C’est ainsi que, dans l’Antiquité, les riches vallées du Nil et de l’Euphrate (Mésopotamie) furent toujours convoitées par des hordes conquérantes. — (Panayiotis Jerasimof Vatikiotis, L’Islam et l’État, 1987, traduction d’Odette Guitard, 1992, p.163)
    • Elle saisit le feuillage d’une façon très-singulière, faisant sortir pour cet effet une langue longue, rugueuse, très-étroite et noire, en l’entortillant autour de l’objet qu’elle convoîte. — (Étienne Geoffroy Saint-Hilaire, Quelques Considérations sur la Girafe, 1827)
Source : Wikitionnaire

Littré (1872-1877)

convoiter

(kon-voi-té) v. a.
  • 1Désirer avidement. Il ne faut point convoiter le bien d'autrui.

    Absolument. Voilà comment j'appris à convoiter en silence, à me cacher, à dissimuler, à mentir, à dérober enfin, Rousseau, Confess. I.

  • 2En particulier, désirer une femme. Vous épousez ma fille, et convoitez ma femme, Molière, Tart. IV, 7.

    Absolument. La chair convoite contre l'esprit, Bossuet, Dang. 1. Certes je ne sais pas quelle chaleur vous monte ; Mais à convoiter, moi, je ne suis pas si prompte, Molière, Tart. III, 2.

    PROVERBE

    Qui tout convoite tout perd.

HISTORIQUE

XIIe s. Mais li vilains dit plainement : Que qui tot coveite tot pert, Benoit de Sainte-Maure, t. I, p. 414, V. 9597. Naboth de Jezrael out une vigne veisine e mult près del paleis lu rei Achab ; e li reis la cuveitad, Rois, 329.

XIIIe s. Car fors à estre as chans [champs] mout durement [elle] convoite, Berte, XXIX. Cascuns estoit convoitans et desirans de conquerre ses anemis, H. de Valenciennes, VI. Qui tout convoite tout piert, Chr. de Rains, 238. Quant li quens Ferrans l'oï ensi parler, si le creut come fols que il fu, et convoita la terre, et quida trop grant cose de soi, ib. 144. Voir dist li livres et savoir : Qui tot covoite trestot pert, Ren. 14391. Sachiés que nul à droit n'i va, Ne n'a pas entencion droite, Qui sans plus delit y convoite, la Rose, 4440. Car c'est la riens [chose] qu'il plus convoite, ib. 3310. Et si disons noz de celles desqueles la compaignie est convoitie por lor joneche ou por lor biaté, Beaumanoir, 41. Il covoita à oïr lor canchons et à veir quix gens c'estoient, Beaumanoir, LXIX, 21. Ne convoite pas sus ton peuple, ne charge pas de toute [maltôte] ne de taille, Joinville, 300.

XIVe s. Affin que, par la resgarder, l'en ne fust tempté de la [Hélène] convoiter, car elle estoit très belle, Oresme, Eth. 55. Comme il se fait mauvais meller de larrechin, Ne convoitier aussi la femme à son voisin, Baud. de Seb. VII, 742. Quand ung bon esprevier a chacié une aloe bas et hault, et il l'a laissie si hault comme on puet regarder, et ung autre esprevier la convoitte et on le laisse aler…, Modus, f° CI.

XVe s. Et le roi leur envoyoit grand et grand argent pour payer leurs frais et despartir à ces seigneurs d'Allemagne qui ne convoitoient autre chose, Froissart, I, I, 66. Tel convoite qui a assez, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 420.

XVIe s. À qui suffit ce que Dieu donne, Plus a que tel porte couronne ; Fol est qui convoite autrui terre Pour tousjours demeurer en guerre, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 230. Qui plus a plus convoite, Leroux de Lincy, ib. p. 402.

Source : Dictionnaire Littré

Étymologie de « convoiter »

(XIIe siècle) Fait, en ancien français coveitier, convetier, convoitier ; du latin cupio (« désirer ») devenu *cupitare en bas latin (c’est une règle assez générale dans le passage du latin au français que les locuteurs romans ont utilisé le fréquentatif des verbes latins, construit sur le supin des verbes → voir habiter, bouger et exploiter). On peut[1] imaginer un passage par le substantif cupiditas « sous l’influence de termes abstraits tels que anxietas, mediatas.
Pour l’évolution phonétique du \p\ latin vers un \v\ en français → voir cuve.
Source : Wikitionnaire

Wallon, cowèter ; provenç. cobeitar, cubitar ; catal. eopdiciar ; espagn. codiciar ; portug. cubicar ; ital. cubitare ; mot formé du bas-latin cupiditia (voy. CONVOITISE).

Source : Dictionnaire Littré

Phonétique du mot « convoiter »

Phonétique Prononciation
France (Lyon) : écouter « convoiter »
Source : Wikitionnaire

Fréquence d'apparition du mot « convoiter »

Source : Google

Traductions du mot « convoiter »

Langue Traduction
English covet
German begehren
Spanish codicia
Portuguese cobiçar
Italian desiderare
Dutch begeren
Polish pożądanie
Russian жаждать
Source : DeePL

Synonymes de « convoiter »

Antonymes de « convoiter »