Disputer

verbe

Définitions de « disputer »

Trésor de la Langue Française informatisé

DISPUTER, verbe.
A.− Emploi intrans.
1. Échanger, avec un interlocuteur, des arguments contradictoires sur un sujet donné (cf. débattre un sujet, discuter d'un sujet).
a) Disputer + compl. introduit par une prép. marquant le propos ou désignant l'interlocuteur.
α) Disputer de, disputer sur.Abeilard disputait, dans les écoles, sur les questions qui s'agitaient alors (Toepffer, Nouv. genev.,1839, p. 90).Ils [les sénateurs] disputent du vote des femmes (Giraudoux, Siegfried et Lim.,1922, p. 163):
1. Qu'est-ce que la science du Moyen Âge, si ce n'est une dispute? La dispute est si chère aux scolastiques, qu'ils se la réservent, se la ménagent, et disposent leurs canons de façon à n'en pas supprimer la matière. Il y a des propositions reconnues fausses que l'on ne condamne pas, pour que l'on puisse en disputer. Renan, L'Avenir de la sc.,1890, p. 496.
[Avec ell. de la prép. de] Nous disputions philosophie (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 177).
Loc. proverbiales
Disputer de la chape à l'évêque. Synon. de se battre de la chape à l'évêque (cf. chape A 2).
Disputer des goûts et des couleurs (cf. couleur I A 1).
Disputer sur la pointe d'une aiguille (cf. aiguille I A c).
β) Disputer avec, contre qqn.Il [P...] a disputé de très bonne foi contre Duteil et Rollinat, qui s'étaient donné le mot (Sand, Corresp.,t. 2, 1812-76, p. 59):
2. Il ne convient donc point de disputer avec le maître, car je t'annonce qu'il est impitoyable et inique, et sourd à la raison; ... Claudel, La Ville,1901, III, p. 481.
b) Disputer + prop. interr. indir. avec ell. de savoir.Il n'est plus personne sur la terre avec qui je puisse (...) disputer quelle maîtresse était la plus belle (Chénier, Amérique,1794, p. 122).
Disputer si.Débattre la question de savoir si (cf. ex. dans rem. s.v. barrésien).
c) Emploi abs. On disputa longtemps et personne ne changea d'avis (France, Île ping.,1908, p. 294).L'archevêque, durement : − Ne disputez pas. Obéissez. Vous disputerez ensuite (Montherl., Port-Royal,1954, p. 1018).
2. P. ext.
a) Entrer en conflit avec quelqu'un pour savoir qui sera le meilleur.
Disputer (avec qqn) de + compl. désignant l'objet du conflit.Disputer de beauté, d'esprit, de laideur (Ac.). Synon. rivaliser de.Mesdames Tallien et Récamier donnèrent le ton dans ces jours d'étalage et toutes les femmes disputèrent de folie pour les imiter (Balzac, Œuvres div., t. 2, 1850, p. 332):
3. La nuit dont tes paupières couvrent tes yeux dispute de suavité avec celle que l'Italie assoupie et parfumée verse sur ton front. Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 4, 1848, p. 286.
b) Emploi pronom., fam. Se quereller, lutter avec. Un enfant de seize ans qui se dispute avec un frère aîné (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 80).On se disputait assez avec la misère, avec le manque de bois, le manque d'eau, le manque de pain, le manque de laine (Queffélec, Recteur,1944, p. 65):
4. Tu ne trouves pas attristant qu'on ne puisse plus passer une soirée entre amis sans se disputer à propos de politique? Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 252.
Vx. Se disputer de + inf.Deux ou trois collégiens de treize ans se disputaient d'être premiers violons dans un bal (Michelet, Journal,1834, p. 159).
c) Disputer précédé du pron. pers. neutre le. Le disputer à qqn (ou à qqc). Chercher à avoir le dessus. On tient à vous le disputer à l'emporter sur vous... adieu, madame (Scribe, Verre d'eau,1840, p. 683).Une voix où le mépris le disputait à l'arrogance (Courteline, Gend. sans pitié,1899, 1, p. 149).Le disputer à qqn ( ou à qqc.) en qqc. Le prince ne voit à sa cour aucune femme qui puisse vous le disputer en beauté (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 105).Ces tours le disputent (...) en hauteur aux monuments les plus élevés de Paris (Balzac, Splend. et mis.,1846, p. 369).
B.− Emploi trans.
1.
a) Lutter pour obtenir ou conserver ce à quoi l'on tient et qu'un autre cherche également à obtenir ou à conserver (cf. arracher, briguer, défendre). Ne perdez pas courage. C'est [Catherine] une femme qui vaut la peine d'être disputée (Sand, Mare au diable,1846, p. 114).D'autres ambassades cherchèrent à rivaliser avec celle-là, mais elles ne purent lui disputer le prix (Proust, Sodome,1922, p. 675).Les vieux platanes de la place disputaient encore leurs feuilles au vent pluvieux (Mauriac, Th. Desqueyroux,1927, p. 233).
SYNT. Disputer une place, un rang, un titre; disputer le pas, la préséance; disputer le pouvoir, la victoire; disputer qqn à la maladie, à la mort, à l'oubli; disputer une victime au supplice; disputer qqn en mariage à qqn d'autre.
Spéc. Disputer le terrain (pied à pied). Empêcher que l'ennemi prenne possession du terrain que l'on défend. Ne rencontrant devant lui que de faibles unités françaises, impuissantes à lui disputer le terrain (Foch, Mém.,t. 2, 1929, p. 93).Au fig. Soutenir avec acharnement ses intérêts ou ses opinions dans un débat :
5. Il fallut accepter cette nouvelle espèce de lutte; la mère Angélique y suffit et sans conseil, écrivant lettres sur lettres à l'archevêque, (...) disputant (...) le terrain pied à pied, et retardant ainsi, pour quelque temps du moins, ce dont l'issue était désormais inévitable. Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 4, 1859, p. 158.
Emploi pronom. passif. Je tournais le dos à la table où se disputait mon futur bonheur (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 85).Il fallait que le moment vînt où se disputerait l'unique chance de sa misérable vie (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1446).
Emploi pronom. indir. à valeur réciproque. Se disputer qqc. ou qqn.Chercher ensemble à s'arracher ce à quoi on tient. Deux beaux enfants blonds, dont les petites mains se disputaient un bouquet de roses (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 360).La gêne, l'humiliation et la rage se disputent son visage crispé (Montherl., Malatesta,1946, III, 2, p. 483).
SYNT. Se disputer l'amour, l'attention, le cœur, les faveurs, la main de qqn; se disputer un emploi, un rôle; se disputer la domination, le monopole, la possession de qqn; se disputer l'avantage, le bonheur, l'honneur de qqc.; se disputer un héritage; se disputer la parole.
Spéc. Se disputer le terrain (cf. supra disputer le terrain). Le monde et l'église occupent et se disputent le même terrain (Maritain, Human. intégr.,1936, p. 116).
b) P. ext. Être en compétition, lutter pour obtenir la victoire à l'issue d'une épreuve. Disputer un championnat, un concours, un match, un tournoi. On dispute une partie d'échecs (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 246).
Emploi pronom. passif. L'après-midi où se disputa la coupe de football inter-blocs (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 309).
2. Fam. [L'obj. désigne une pers.] Adresser des remontrances à qqn :
6. ... « je veux d'abord demander à madame parce que je connais monsieur; si madame n'est pas de son avis, monsieur me disputera pour avoir fait ce qu'il voulait.» Achard, Jean de la Lune,1929, II, 8, p. 22.
Avec constr. factitive pronom. Se faire disputer.Tu vas te faire disputer; (Arland, Ordre,1929, p. 409).
Prononc. et Orth. : [dispyte], (je me) dispute [dispyt]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1170 « discuter, débattre » (Rois, éd. E. Curtius, livre IV, chap. IV, 33, p. 119 : de tutes arbres parlad e desputad); 2emoitié xiies. deputer [inf. substantivé] (Epitre de St Etienne, IV a ds T.-L.); 1544 part. prés. subst. (G. d'Aurigny, Le Livre de la police humaine, trad. J. Le Blond, 18a (1553) ds Quem. Fichier); 2. 1637 disputer de (qqc.) avec (qqn) « rivaliser de (qqc.) avec (qqn) » (Descartes, Méth., IV, 4 ds Littré : disputer de la félicité avec leurs dieux); 3. a) 1609 « lutter pour la possession de quelque chose » (Regnier, Satires, éd. G. Raybaud, XI, 198); spéc. 1918 disputer un championnat (Maurois, Silences Bramble, p. 9); b) 1667 se disputer (une pers., une chose) (Racine, Andromaque, V, 3 : Chacun se disputait la gloire de l'abattre); c) 1670 le disputer en (qqc.) à (qqn) (Molière, Les Amants magnifiques, I, 2 : il n'est point de spectacle ... qui puisse le disputer en magnificence à celui que vous venez de donner); 4. a) 1680 pronom. « se quereller » (Rich.); b) av. 1755 fam. disputer (qqn) « faire querelle (à quelqu'un) » (St-Simon, 62, 48 ds Littré). Empr. au lat. class.disputare (proprement : mettre au net après examen et discussion [putare, puto]) « examiner; discuter, raisonner ». Fréq. abs. littér. : 1 700 (disputé : 252). Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 358, b) 2 373; xxes. : a) 1 767, b) 2 033. Disputé : xixes. : a) 403, b) 317; xxes. : a) 289, b) 382. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, p. 122, 237, 320, 390. − Gougenheim (G.). Chercher et fouiller. In : [Mél. Harmer (L. C.)] 1970, p. 22. − Quem. 2es. t. 2 1971.
Source : CNRTL

Wiktionnaire

Français

Verbe

disputer \dis.py.te\ intransitif, transitif ou pronominal 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Être en discussion plus ou moins vive à propos d’opinions, d’intérêts.
    • Interrompez-moi donc si vous voulez, je ne saurais disputer si l’on ne m’interrompt — (Molière, Don Juan, acte III scène I)
    • Dans la rue, au lieu de cheminer de ce pas méthodique et qui révèle une machine nerveuse parfaitement équilibrée, il se pressait, il s’arrêtait, il gesticulait, comme disputant avec lui-même. — (Paul Bourget, Le Disciple, page 322, 1899)
    • Comme on disputait de la divinité de Jésus, un étourdi – probablement un jéciste, une fois de plus, avait dû penser Patrice – avait déclaré hautement – et courtement ! – que pour lui, l'essentiel, c'était le Christ. — (Philippe Warnier, La décision, Éditions Nouvelle Cité, 1990, page 151)
  2. (Transitif) Contester pour obtenir ou pour conserver quelque chose.
    • Comme, parmi les perdrix, il naît un tiers plus de mâles que de femelles, il arrive, dans le temps de la pariade, que plusieurs coqs se disputent la même poule qui, à force d'être tourmentée, déserte souvent le canton; […]. — (Dictionnaire des forêts et des chasses publié par le Journal des Chasseurs, sous la direction de Léon Bertrand, Paris, 1846, page 346)
    • Mon compagnon préféra dormir, et moi, déjà plus familiarisé avec la cuisine espagnole, je me mis à disputer mon dîner à d’innombrables essaims de mouches. — (Théophile Gautier, Voyage en Espagne, Charpentier, 1859)
    • J’ai disputé à mes frères les biens terrestres, opposant la ruse à la ruse, la violence à la violence, j'ai tué et j'ai été moi-même à deux pas de la mort, tout cela pour l’amour de cet or infernal… — (Chevalier Léopold de Sacher-Masoch, Le Legs de Caïn, dans les Contes Galiciens, traduction anonyme de 1874)
    • En même temps plusieurs Chouans se jettent sur les provisions, se les disputent, se les arrachent, et donnent enfin tout l’ignoble spectacle d'une scène de bandits. — (Jacques Duchemin Descepeaux , Lettres sur l'origine de la Chouannerie et sur les Chouans du Bas-Maine, tome 1, Imprimerie royale, 1825, page 325)
    • Devant la porte, trois gniards se disputent à grands coups de pied un ballon crevé. — (Denis Guelpa, La branche de Muandapa, L'Âge d'Homme, 1990, page 126)
  3. (Transitif) (Sens figuré) soutenir avec force son opinion, ses intérêts ou ceux d’autrui.
    • Son adversaire lui a bien disputé le terrain.
  4. (Transitif) (Familier) Gronder ; réprimander.
    • « Il y a eu un temps que je sacrais pas mal, et M. le curé Tremblay m’a disputé une fois parce que j’avais dit devant lui que je n’avais pas peur du diable. — (Louis Hémon, Maria Chapdelaine, J.-A. LeFebvre, Montréal, 1916)
    • — Tu as peut-être eu tort de le disputer… répliqua Françoise. — (Georges Simenon, Les Demoiselles de Concarneau, Gallimard, 1936, réédition Folio, page 59)
    • Il se rendit compte qu'elle pensait se faire disputer pour avoir pris les transports en commun. — (Sam Hayes, Étienne Ménanteau (traduit par) Les liens du sang, Éd. City, 2011)
  5. (Sport) Soutenir une compétition ; lutter pour la victoire.
    • La rue est obstruée sur tout sa largeur par les premiers combattants qui disputent pied à pied le sol aux Saxons. — (Vicomte Ulric-Guelfe de Civry, Un engagement de cavalerie, le combat de Buzancy, 27 Août 1870, Londres : Arliss Andrews, 1878)
    • Les matches se disputaient au milieu d'un grand vacarme produit par les cris des parieurs comme les parties de chistera en Espagne. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil; tome 1 : De New-York à Tahiti, 1929)
  6. (Pronominal) (Familier) Se quereller.
  7. (En particulier) Raisonner, argumenter pour ou contre sur un sujet donné.
    • Disputer sur telle proposition.
    • Nous disputâmes un moment ces divers points. — (Roger Vailland, 325.000 francs, 1954, réédition Le Livre de Poche, page 123)

disputer de intransitif

  1. Débattre au sujet de quelque chose.
    • Ces deux femmes disputent de beauté, d’esprit, de laideur.
    • Ces deux familles disputent de noblesse.
    • À une croisée de chemin, ils disputèrent de la direction à prendre. — (Marcel Aymé, La jument verte, Gallimard, 1933, collection Le Livre de Poche, page 166)

le disputer à intransitif

  1. S’emploie pour exprimer que les choses ou les personnes dont il s’agit paraissent avoir des qualités si égales que l’on ne sait laquelle l’emporte.
    • Il est de ceux dont la vanité le dispute à la vacuité.
    • Tyr pouvait le disputer aux cités les plus opulentes.
    • J’estime que votre mariage est une comédie dont la laideur ne le dispute qu’au burlesque. — (Maurice Dekobra, La Madone des sleepings, 1925, réédition Le Livre de Poche, page 102)
    • Le capitaine badin jusqu’au bout de sa badine passa son doigt ganté de chevreau blanc sur la culasse luisante de graisse de son pistolet-mitrailleur démonté et le considéra souillé en demandant d’un ton où l’insolence le disputait à la perplexité : « C’est ça que vous appelez un pistolet-mitrailleur propre ? » — (Georges Perec, Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?, Denoël, 2000, collection Folio, pages 47-48)
  2. Prétendre égaler quelqu'un en quelque chose.
    • Le disputer à quelqu’un.

Anagrammes

→ Modifier la liste d’anagrammes

  • disrupte, disrupté
  • putrides
  • turpides
Source : Wikitionnaire

Littré (1872-1877)

disputer

(di-spu-té) v. n.
  • 1Avoir une dispute sur un point de théologie, de philosophie, de morale, de science, etc. Je ne dispute jamais du nom, Pascal, Prov. 1. Quand je croyais que vous disputiez de la vérité ou de la fausseté des propositions, je vous écoutais avec attention, car cela touchait à la foi, Pascal, ib. 17. De quoi disputiez-vous, sinon du sens de cet auteur ? Pascal, ib. 18. Disputez, me dit-il, contre le P. Bauny, je vous fais un récit et vous contestez contre moi ; il ne faut jamais disputer sur un fait, Pascal, ib. 6. Le libertinage d'esprit, la fureur de disputer des choses divines sans fin, sans règle, sans soumission, Bossuet, Reine d'Angl. Une autre fois je mettrai mes raisonnements par écrit pour disputer avec vous, Molière, D. Juan, I, 2. Je me sens en humeur de disputer contre vous, Molière, ib. III, 1. Le chemin étant long et partant ennuyeux, Pour l'accourcir ils disputèrent, La Fontaine, Fabl. IX, 14. Nous disséquons des mouches, dit le philosophe, nous mesurons des lignes, nous assemblons des nombres, nous sommes d'accord sur deux ou trois points que nous entendons, et nous disputons sur deux ou trois mille que nous n'entendons pas, Voltaire, Microm. 7.

    Disputer si, débattre la question de savoir si. On dispute dans l'école si la logique est une science ou un art.

    Ne pas disputer que, avec le subjonctif, ne pas contester. On ne dispute pas qu'il ne soit écrit…, Bossuet, Hist. II, 13.

  • 2Avoir sur une chose quelconque une vive discussion. Nous disputons en vain et ce n'est que folie De vouloir par sa perte acquérir Émilie, Corneille, Cinna, III, 1. Mon nom seul est coupable, et, sans plus disputer, Pour te faire innocent tu n'as qu'à le quitter, Corneille, Héracl. IV, 4. Quoi qu'en votre faveur Marcelle lui dispute, Il mande Théodore, et la veut promptement Faire conduire au lieu de son bannissement, Corneille, Théod. IV, 2. Il eut contentement : non-seulement on disputa, mais on se querella, et on se sépara sans avoir trop envie de se revoir de plus de huit jours, Racine, Lettres à Boileau, 5. Ah ! vous deviez du moins plus longtemps disputer, Racine, Brit. III, 7. Eh bien ! régnez, cruel, contentez votre gloire ; Je ne dispute plus…, Racine, Bérén. IV, 5. Je viens pour vous combattre et non pour disputer, Voltaire, D. Pèdre, IV, 2. Je dispute toujours le plus tard que je puis, Collin D'Harleville, Optimiste, IV, 7.

    Disputer sur la pointe d'une aiguille, avoir une dispute pour des choses sans valeur.

    Disputer de la chape à l'évêque, disputer à qui appartiendra une chose qui ne peut être à aucun de ceux qui se la disputent.

    Poétiquement. Nous étions contraints de disputer contre les flots pour rattraper le dessus de ce mât, Fénelon, Tél. VI.

  • 3 Fig. Rivaliser. Ne voudriez-vous point disputer de la gloire, de la bonté, avec la femme d'Auguste ? Guez de Balzac, Disc. à la régente. Je crois que c'est principalement en ceci [être content de son sort] que consistait le secret de ces philosophes qui ont pu autrefois se soustraire à l'empire de la fortune, et, malgré les douleurs et la pauvreté, disputer de la félicité avec leurs dieux, Descartes, Méth III, 4. Quoiqu'elles soient filles du soleil et de l'aurore et qu'elles disputent de l'éclat avec les perles et les diamants, Voiture, Lett. 73. Ce jeu où les peuples ont disputé de la puissance, Bossuet, Hist. III, 2. Un peu de prospérité fait disputer de faste le publicain avec les princes du peuple, Massillon, Car. Rich. Dans la corruption une cour endormie, Avec son empereur disputant d'infamie, Legouvé, Épich. et Néron, I, 2.

    Fig. Ce n'est pas que le mensonge ne se glorifie souvent des mêmes titres, et qu'il n'y ait parmi les hommes de vieilles erreurs qui semblent disputer avec la vérité de l'ancienneté de leur origine, Massillon, Car. Vérité de la religion.

    Disputer à. Je suis un pauvre pâtre, et ce m'est trop de gloire Que deux nymphes d'un sang le plus haut du pays Disputent à se faire un époux de mon fils, Molière, Mélicerte, I, 4. Le peuple disputait avec la noblesse à qui agirait le plus par ces maximes, Bossuet, Hist. III, 6.

  • 4 V. a. Faire de quelque chose l'objet d'une lutte contre quelqu'un. Cet écolier a disputé la première place. Le régiment, bien commandé, disputa longtemps le terrain contre des forces supérieures. Et que serait heureux qui pourrait aujourd'hui Disputer cette place et l'emporter sur lui ! Corneille, Nicom. I, 2. Une troupe hardie M'a voulu de nos murs disputer la sortie, Racine, Théb. I, 3. Mais par de vrais combats, par de nobles dangers, Leur disputer les cœurs du peuple et de l'armée, Racine, Baj. III, 4. C'est ainsi que Néron sait disputer un cœur, Racine, Brit. III, 8. Quand de Britannicus la mère condamnée Laissa de Claudius disputer l'hyménée, Racine, ib. IV, 2. Il excelle à conduire un char dans la carrière, à disputer des prix indignes de ses mains, Racine, ib. IV, 4. Que ces rois, qui pouvaient vous disputer ce rang, Sont prêts pour vous servir de verser tout leur sang, Racine, Iphig. I, 3. Quoi ! vous ne savez pas Que le rhinocéros me dispute le pas ? La Fontaine, Fabl. XII, 21. Ils n'avaient rien à lui disputer sur l'équipage et la magnificence, Hamilton, Gramm. 6. Pendant que nos soldats luttaient encore avec l'incendie et que l'armée disputait au feu cette proie [Moscou], Ségur, Hist. de Napol. VIII, 6. Les femmes de Livie, celles qui, consacrées jadis aux soins de sa beauté, luttaient pour elle contre le temps et disputaient aux années quelques-uns de ses charmes, sont placées à côté d'elle en de petites urnes, Staël, Corinne, V, 2.

    Fig. Disputer le terrain, soutenir vivement ses opinions, ses intérêts dans un débat.

    Terme de marine. Disputer le vent, courir des bordées pour gagner le vent sur d'autres bâtiments.

    Le disputer à quelqu'un, prétendre l'égaler. Thèbes le pouvait disputer aux plus belles villes de l'univers, Bossuet, Hist. III, 3.

    Se disputer une personne, une chose, c'est-à-dire disputer entre soi une personne, une chose, se dit de plusieurs personnes qui veulent la posséder. Ces deux femmes se sont longtemps disputé un amant. Chacun se disputait la gloire de l'abattre, Racine, Andr. V, 3. Entre Sénèque et vous disputez-vous la gloire, à qui m'effacera plus tôt de sa mémoire, Racine, Brit. I, 2. Des lambeaux pleins de sang et des membres affreux Que des chiens dévorants se disputaient entre eux, Racine, Athal. II, 5. Plusieurs villes se disputent l'honneur d'avoir donné le jour à Homère, Barthélemy, Anach. Introd. 1re partie.

    Fig. Mille objets se disputaient nos regards, Acad.

  • 5 Familièrement. Disputer quelqu'un, lui faire querelle. Mme de Pontchartrain le disputa [le baron de Breteui], et pour fin lui dit qu'elle pariait qu'il ne savait pas qui avait fait le Pater, Saint-Simon, 62, 48.

REMARQUE

1. Disputer quelqu'un, pour dire lui faire querelle, n'est pas dans le Dictionnaire de l'Académie ; mais il est du langage familier et autorisé par quelques écrivains.

2. Se disputer, v. réfl. Avoir une querelle : ils se sont longtemps disputés ensemble ; il se disputa avec son portier. Cette locution est aussi du langage tout à fait familier ; mais elle est condamnée par les grammairiens qui veulent qu'on dise : ils ont longtemps disputé ensemble ; il disputa avec son portier. Le fait est que cette locution n'a en sa faveur ni la grammaire ni l'autorité des écrivains.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

DISPUTER. Ajoutez :
6Débattre par la discussion. Une note à la suite de la troisième série nous apprend que ces questions quodlibétiques furent disputées par maître Pierre d'Auvergne en 1298, avant Noël, Hist. litt. de la France, t. XXV, p. 112.
7Disputer que, soutenir que. Ceux qui disputent qu'il n'y en a pas [d'ingratitude] voudraient être juges et parties, Sévigné, 10 avril 1671.

REMARQUE

Ajoutez :

3. Dans le Clitandre de Corneille, un commentateur de Corneille (Joly) a voulu faire remonter l'origine de la locution disputer sur la pointe d'une aiguille, à la scène 1 de l'acte IV, où un amant à qui sa maîtresse a crevé l'œil avec une aiguille se met à faire la leçon à l'instrument de son malheur. Cette étymologie, comme la plupart des étymologies anecdotiques, est sans valeur.

HISTORIQUE

XIIe s. De pluisurs altres choses unt entr'els desputé, Dunt um ne m'a encore acointié n'acerté, Ne tut ne puet pas estre en mun livre noté, Th. le mart. 115. E des bestes e des oisels e des peissuns desputad, Rois, 241.

XIIIe s. Aussi vous di je, fist li roys, que nulz, se il n'est très bon clerc, ne doit disputer à eulz [les Juifs], Joinville, 198.

XIVe s. Les autres estudient ou desputent ensemble, Oresme, Eth. 292.

Source : Dictionnaire Littré

Étymologie de « disputer »

(XIIe siècle) Du latin disputare (« examiner, discuter »), d’abord employé au sens de « discuter, débattre », puis à partir du XVIIe au sens de « rivaliser avec, (se) quereller ».
Source : Wikitionnaire

Lat. disputare, de dis… préfixe, et putare, penser (voy. PUTATIF) ; provenç. desputar ; espagn. disputar ; ital. disputare.

Source : Dictionnaire Littré

Phonétique du mot « disputer »

Phonétique Prononciation
France : écouter « disputer [dis.py.te] »
France (Lyon) : écouter « disputer [dis.py.te] »
Mulhouse (France) : écouter « disputer »
Source : Wikitionnaire

Fréquence d'apparition du mot « disputer »

Source : Google

Traductions du mot « disputer »

Langue Traduction
English disputer
German Streitschlichter
Spanish distribuidor
Portuguese distribuidor
Italian dispensatore
Dutch verzender
Polish dyspozytor
Russian диспетчер
Source : DeePL

Synonymes de « disputer »

Antonymes de « disputer »