Insinuant

adj et part prés

Définitions de « insinuant »

Trésor de la Langue Française informatisé

INSINUANT, -ANTE, part. prés. et adj.

I. − Part. prés. de insinuer*.
II. − Emploi adj.
A. − Littér. [Correspond à insinuer II A] Qui s'introduit doucement et adroitement. D'un coude insinuant, Léon me fraye un lent passage (Colette, Cl. s'en va,1903, p. 76).Un jeune éléphant (...) de sa trompe insinuante et fureteuse ramasse soigneusement ce qu'il juge comestible (Maeterlinck, Hôte inconnu,1917, p. 188).
Au fig. [En parlant d'un inanimé abstr.] Qui s'installe de façon insidieuse. Aimer en secret, sans aveux, sans aucun désir, sans aucune sorte d'espérance est un mal insinuant, une brûlante incubation (Cendrars, Dan Yack, Plan de l'Aiguille, 1929, p. 166).
B. − [Correspond à insinuer II B 2] Qui s'insinue avec ruse et habileté auprès d'autrui. Synon. adroit, artificieux, habile, patelin.Impétueux comme un poëte, et poli comme un courtisan, il savait être insinuant et rusé comme un jésuite (Joubert, Pensées,1824, p. 186).Plus insinuant et plus adroit que ne l'étaient d'ordinaire les gens de race germanique, il avait conservé de leur caractère le penchant à la débauche sans pudeur et sans retenue (Thierry, Récits mérov., t. 2, 1840, p. 141):
... il était le type même du parlementaire silencieux, qu'on ne connaît que de silhouette, sauf dans les ministères où les chefs de bureau le voient souvent, quémandant, insinuant, cajoleur, genre d'hommes que les ministres ont tendance à dédaigner jusqu'au jour où un bulletin bleu, lourd de rancune, les rappelle à plus de considération. Daniel-Rops, Mort,1934, p. 132.
C. − P. ext. Qui est destiné à circonvenir autrui. Air, façon, langage, parole, manière, ton, voix insinuant(e). Son ton prit une certaine componction insinuante (Goncourt,MmeGervaisais,1869,p. 250).Cette action démoniale, insinuante et têtue (Huysmans,En route,t. 2,1895,p. 214).
En partic. [En parlant d'une pers. ou p. méton. de son attitude] Qui cherche à plaire. Ce placide visage, ce regard insinuant et doux, ce ton confidentiel, et cette inclinaison de la tête sur la gauche qui donnait au prêtre un air constamment recueilli (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1376).
Le juge d'instruction, homme insinuamment bienveillant (Verlaine, Œuvres compl., t. 4, Prisons, 1893, p. 384).
REM.
Insinuamment, adv.,hapax. Le juge d'instruction, homme insinuamment bienveillant (Verlaine, Œuvres compl., t. 4, Prisons, 1893, p. 384).
Prononc. et Orth. : [ε ̃sinɥ ɑ ̃], fém. [-ɑ ̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Fréq. abs. littér. : 149.

INSINUER, verbe trans.

I. − Emploi trans.
A. − DR. ANC. Consigner (un acte privé) dans un registre public pour lui donner l'authenticité. Insinuer, faire insinuer une donation, un testament (Ac. 1798-1878).
B. − Littéraire
1. Qqn insinue qqc. dans qqc.Introduire doucement et adroitement dans. L'étranger ouvroit son porte-feuille, et, par une présence d'esprit étonnante, défaisoit sa cravatte [sic] et y insinuoit un gros paquet de billets de banque (Balzac, Annette, t. 1, 1824, p. 112).J'aurais réussi peut-être, à mettre le doigt sur la fissure, à y insinuer la main, à l'élargir (Genevoix, Assassin,1948, p. 179).
P. anal. Quant aux petits vers qu'on trouve dans les fruits ou dans les galles, Swammerdam pense qu'ils doivent venir d'insectes ayant insinué leur semence dans le tissu végétal (J. Rostand, Genèse vie,1943, p. 25).
2. Au fig.
a) Qqn/qqc. insinue qqc. dans qqc.Faire pénétrer adroitement. Insinuer de bons sentiments dans le cœur d'un enfant; insinuer dans l'âme, l'esprit. Insinuer une doctrine (Ac.1935) :
1. Le mensonge vital, que l'entraînement sincère des mots et du cœur insinue jusque dans nos conduites morales, est le principal responsable du discrédit que tant de vertus étroites ou troubles jettent sur la vertu. Mounier, Traité caract.,1946, p. 377.
b) En partic., souvent péj. Laisser entendre quelque chose sans l'exprimer ouvertement. Synon. glisser, suggérer.
Qqn insinue qqc. à qqn :
2. La véritable hypocrisie dans cette signature était manifestée par la suppression bien moins des autres lettres du nom de Swann que de celles du nom de Gilberte. En effet, en réduisant le prénom innocent à un simple G, Mllede Forcheville semblait insinuer à ses amis que la même amputation appliquée au nom de Swann n'était due aussi qu'à des motifs d'abréviation. Proust, Fugit.,1922, p. 587.
Usuel. Qqn insinue qqc.Il se croyait en possession d'une certitude, (...) il en insinuait tout doucement l'esprit et n'en révélait pas la lettre (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 327).Il y a des choses que l'on ne doit jamais dire − semble-t-il toujours insinuer − précisément parce qu'elles vont de soi (Du Bos, Journal,1923, p. 265).Je n'ai point songé à prendre la défense de certains gros intérêts lésés, comme l'insinue mon contradicteur (Mauriac, Bâillon dén.,1945, p. 425).
Emploi abs. J'ai employé tout mon art d'insinuer et de plaire (France, Bonnard,1881, p. 439).Il chicane, pirouette, insinue, cligne de l'œil vers les « dames » avec lesquelles il ne veut surtout pas se brouiller (Guéhenno, Jean-Jacques,1948, p. 164).
II. − Emploi pronom.
A. − Vx ou littér.
1. Qqn/qqc s'insinue dans qqc.Pénétrer doucement et progressivement dans quelque chose. Synon. s'infiltrer.Les couches de tissu cellulaire, qui s'insinuent dans les divisions du cerveau, qui se glissent entre les stries médullaires (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 215).Un flot neuf d'arrivants s'insinue dans les moindres interstices du public massé; des étudiants à bérets, des avocats en robe (...) se juchent en grappes, sur la crête des portants (Martin du G., J. Barois,1913, p. 380).
2. Qqn s'insinue entre.Se glisser entre. Le mécanicien a mis la voiture en marche. Il s'insinue entre les leviers et le volant pour regagner son siège frémissant (T. Bernard, Sur les grands chemins, Paris, Ollendorff, 1911, p. 134).
3. [Sans compl. prép.] Les plantes (...) profitant des moindres ouvertures (...) s'insinuent, puis, une fois entrées, elles grimpent, s'enroulent aux fenêtres, courent le long des balcons (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 170).
B. − Au fig., littér.
1. Qqc. s'insinue dans qqc.S'introduire dans (l'esprit, les pensées de quelqu'un). Synon. envahir, se glisser, pénétrer.Si quelque pensée orgueilleuse s'insinue dans notre imagination, nous la rejetons aussitôt avec la salive du dédain (Lautréam., Chants Maldoror,1869, p. 149).Des préoccupations d'une précision trop humaine se mêlèrent à la ferveur de ses prières, (...) même des doutes terribles et lancinants s'insinuèrent en son âme (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 225).Un danger se dissimule dans ces phrases douceâtres, des impulsions meurtrières s'insinuent dans l'inquiétude affectueuse, une expression de tendresse distille tout à coup un subtil venin (Sarraute, Ère soupçon,1956, p. 122).
[Sans compl. prép.] :
3. ... la pauvreté cessait d'être seulement privative, comme la croient trop souvent les riches; on la sentait réelle, agressive, attentionnée, elle régnait affreusement sur les esprits et sur les cœurs, s'insinuait partout, touchait aux endroits les plus secrets et les plus tendres, et faussait les ressorts délicats de la vie. Gide, Si le grain,1924, p. 473.
2. Péj. Qqn s'insinue dans qqc., auprès de qqn.
a) S'introduire avec habileté ou ruse dans, auprès de. Ambitieux, intrigant qui s'insinue; s'insinuer par la brigue, la flatterie :
4. Elle [l'Église] avait beaucoup d'influence, elle n'avait pas le pouvoir. Elle s'était insinuée dans les magistratures municipales; elle agissait puissamment sur les empereurs, sur tous leurs agens; mais l'administration positive des affaires publiques, le gouvernement proprement dit, l'Église ne l'avait pas. Guizot, Hist. civilisation, Leçon no10, 1828, p. 10.
b) Gagner adroitement (les bonnes grâces, la confiance, l'esprit de qqn). Les princes, n'ayant jamais affaire qu'à des serviteurs de bon goût, qui s'insinuent plus facilement dans leur faveur que nos gens dans la nôtre, vivent et meurent sans avoir jamais l'idée des choses telles qu'elles sont (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 428).Sir Williams s'insinuait dans l'esprit et la confiance de la vieille baronne (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 450).
Prononc. et Orth. : [ε ̃sinɥe], (il) insinue [ε ̃siny]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1336 dr. anc. « publier, notifier, faire connaître (un acte juridique) » (Arch. JJ 70, fol. 13 rods Gdf.); 1368 id. « enregistrer (id.) » (Charte ds Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p. 420). B. 1. 1359 « faire pénétrer adroitement dans l'esprit » (Ch. A. mun. Senlis ds Gdf. Compl.); 2. 1541 s'insinuer a (qqn) « se glisser adroitement ds l'entourage de quelqu'un » (Calvin, Instit., VI, p. 363 ds Hug.); 1662 esprit insinuant [de Mazarin] (La Rochefoucauld, Mém., éd. D.L. Gilbert et J. Gourdault, t. 2, p. 63 [1643]); 3. 1588 s'insinuer en « (d'une substance) pénétrer dans » ici, empl. par image (Montaigne, Essais, II, XII, éd. M. Thibaudet et M. Rat, p. 467). Empr. au lat.insinuare « faire pénétrer au sein de, introduire, glisser dans » fig. « pénétrer, faire pénétrer dans les bonnes grâces, la faveur de quelqu'un » à l'époque class.; « déclarer, notifier, faire connaître » à basse époque; spéc. « déclarer, notifier, faire connaître » à basse époque; spéc. « enregistrer » à l'époque médiév. (s.d. ds Nierm.). Fréq. abs. littér. : 721. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 672, b) 713; xxes. : a) 1 179, b) 1 399.
Source : CNRTL

Wiktionnaire

Français

Adjectif

Singulier Pluriel
Masculin insinuant
\ɛ̃.si.nɥɑ̃\

insinuants
\ɛ̃.si.nɥɑ̃\
Féminin insinuante
\ɛ̃.si.nɥɑ̃t\
insinuantes
\ɛ̃.si.nɥɑ̃t\

insinuant masculin

  1. Qui a l’adresse et le talent de s’insinuer, d’insinuer quelque chose.
    • C’est un homme fort insinuant.
    • Femme insinuante. (Par extension)
    • Manières insinuantes.
    • Air insinuant.
    • Langage insinuant. (Rhétorique)
    • Exorde insinuant.
    • Un riche propriétaire, M. Roudier, au visage grassouillet et insinuant, y discourait des heures entières, avec la passion d’un orléaniste que la chute de Louis-Philippe avait dérangé dans ses calculs. — (Émile Zola, La Fortune des Rougon, G. Charpentier, Paris, 1871, ch. III ; réédition 1879, page 93)
    • Le vétérinaire ne relut sa lettre qu’une fois. Charmé par le bonheur de ses transitions, la fermeté insinuante de ses arguments, il la mit sous enveloppe sans plus hésiter, prit son chapeau melon et gagna la porte. — (Marcel Aymé, La jument verte, Gallimard, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 80)
    • Avant le jour, elle fut réveillée par l’intrusion d’un corps fluet, qui geignait tout bas, se glissait sur le grand canapé rompu avec une adresse de bête insinuante. — (Colette, Le toutounier, 1939)

Forme de verbe

Voir la conjugaison du verbe insinuer
Participe Présent insinuant
Passé

insinuant \ɛ̃.si.nɥɑ̃\

  1. Participe présent de insinuer.
    • La constipation se guérit en insinuant du beurre dans l’anus de l’animal pour amollir la fiente ; la tirer ensuite avec le doigt, ce qui se nomme défienter : suppositoires de savon ; lavemens comme aux tranchées. — (abbé Rozier, J.A. Mongez le jeune, M. de la Métherie, Observations sur la physique, sur l’histoire naturelle et sur les arts, 1786, page 97)

Anagrammes

→ Modifier la liste d’anagrammes

  • Nuisantin, nuisantin

Voir aussi

  • insinuation
Source : Wikitionnaire

Littré (1872-1877)

insinuant, ante

(in-si-nu-an, an-t') adj.
  • 1Qui s'insinue, qui pénètre doucement. On peut bien les subtiliser [les corps], les rendre plus déliés, les réduire en vapeurs et en esprits ; par là ils deviendront plus vites, plus mobiles, plus insinuants, mais cela ne les fera pas sentir, Bossuet, Conn. V, 13. L'eau si fluide, si insinuante, si propre à échapper, Fénelon, Exist. III.
  • 2 Fig. Qui sait s'introduire auprès des gens et les gagner, les capter. Il y avait dans l'armée un Dolope, nommé Eurymaque, flatteur, insinuant, sachant s'accommoder à tous les goûts et à toutes les inclinaisons des princes, Fénelon, Tél. XVI. Les cours ne sauraient se passer d'une certaine espèce de courtisans, hommes flatteurs, complaisants, insinuants, La Bruyère, VIII. Elle avait tous les agréments de l'insinuation, sans paraître insinuante, Marivaux, Marianne, 10e part. Jamais le grave Tillotson ne parla avec tant d'énergie ; jamais l'insinuant Smaldrige n'eut des grâces si touchantes, Voltaire, Jenni, 7. Un homme est doux et facile, on le trouve insinuant, Vauvenargues, Caractères.

    Il se dit dans le même sens, en parlant des choses. S'ils sont courts, ils [les livres des mystiques] remuent de grandes questions ; leur brièveté les rend plus insinuants, Bossuet, États d'oraison, I, 10. Des manières insinuantes et persuasives, l'art de gagner les cœurs, et de se les attacher encore plus par l'affection que par l'intérêt, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. II, p. 168, dans POUGENS.

Source : Dictionnaire Littré

Étymologie de « insinuant »

De insinuer.
Source : Wikitionnaire

Phonétique du mot « insinuant »

Phonétique Prononciation
France (Nancy) : écouter « insinuant »
Source : Wikitionnaire

Fréquence d'apparition du mot « insinuant »

Source : Google

Traductions du mot « insinuant »

Langue Traduction
English insinuant
German angedeutet
Spanish insinuante
Portuguese insinuante
Italian insinuant
Dutch insinuant
Polish bezsensowny
Russian insinuant
Source : DeePL

Synonymes de « insinuant »

Antonymes de « insinuant »